La Suisse a-t-elle besoin d’une infrastructure pour l’hydrogène ? Une analyse concrète


L’hydrogène est porteur d’espoir pour la transition énergétique, cependant des questions se posent quant à son utilisation et son utilité pour la Suisse. Dans un document de réflexion, swisscleantech commente les débats actuels, émet des recommandations et examine de manière réaliste la demande, les besoins en infrastructures et les alternatives.

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L’hydrogène : un agent énergétique qui a du potentiel – mais pas à n’importe quel prix

L’hydrogène joue un rôle clé dans le cadre de la production des énergies renouvelables. On ne sait cependant pas encore à l’heure actuelle s’il sera largement utilisé sous forme d’hydrogène pur ou de produits dérivés comme le méthanol ou l’ammoniac. Cette question est centrale pour décider si la Suisse doit investir dans une infrastructure complète pour l’hydrogène. Outre la disponibilité, le prix est également déterminant : il faut partir du principe que les énergies renouvelables resteront à long terme au moins deux fois plus chères que les sources d’énergie fossiles.

La demande restera limitée

La demande d’hydrogène en Suisse devrait rester limitée. Le transport aérien, la navigation, certains processus industriels et une partie du trafic poids lourds seront les principaux clients pour cette énergie renouvelable. Mais on ne sait pas encore aujourd’hui si l’on utilisera ici de l’hydrogène ou un dérivé.

En même temps, face à l’utilisation de l’hydrogène, il existe des alternatives moins chères et plus efficaces, en particulier l’électrification directe. Celles-ci devraient s’imposer dans la plupart des applications. Pour préserver l’industrie suisse, le pays devrait investir de manière ciblée dans la recherche sur l’électrification de la chaleur industrielle – un secteur à fort potentiel.

Infrastructure : raccordement sélectif plutôt que développement à grande échelle

Il faut donc renoncer à la construction d’un réseau d’hydrogène à grande échelle. À la place, la Suisse devrait raccorder son infrastructure de manière ciblée à un futur réseau d’hydrogène européen et concentrer les principaux consommateurs à cet endroit. Cela permettrait de desservir des applications spécialisées sans construire des infrastructures coûteuses et surdimensionnées. Parallèlement, des sites de production locaux pourraient être intéressants, principalement pour couvrir des besoins locaux ou pour remplacer l’hydrogène gris utilisé aujourd’hui par de l’hydrogène vert. Cette production ne doit pas être entravée par des réglementations.

Des importations plutôt qu’une production nationale

La Suisse importera des énergies renouvelables plutôt que du pétrole comme à l’heure actuelle – mais en bien moins grande quantité. Les conditions-cadre techniques et économiques plaident en faveur de l’importation, principalement de régions où les conditions de production sont favorables comme la Patagonie, l’Afrique du Sud, Oman ou l’Australie. Sur de longues distances, notamment entre continents, les dérivés sont préférables.

Électricité, CO₂ et recherche : où la Suisse devrait investir

Dans les décennies à venir, la Suisse devra investir massivement dans trois types d’infrastructures : dans le développement des énergies renouvelables, dans la distribution d’électricité et dans le transport du CO2 et l’élimination des émissions de CO2 inévitables. Cela limite encore les moyens financiers pour une infrastructure pour l’hydrogène.

Conclusion : oui à l’hydrogène, mais avec modération

La transition énergétique a besoin de solutions. L’hydrogène peut être l’une de ces solutions, mais pas à grande échelle. Pour la Suisse, le constat est clair : concentration sur quelques applications, raccordement intelligent au réseau international et focus sur des alternatives comme l’électrification et l’utilisation de dérivés facilement manipulables, telles sont les voies à suivre. Cette vision ne manque pas d’ambition, elle est au contraire bien plus réaliste.

Les contenus de cet article et du document de réflexion ne reflètent pas la position de tous les adhérents, ceux-ci ont été élaborés sur la base de multiples discussions avec des parties prenantes, dont de nombreux adhérents. Les contenus correspondent à l’état de nos connaissances au 12 mai 2025.